17 Apr
17Apr

Conformément  aux  articles  Article  L.4131-2et  suivant du  Code  du  Travail,  voici  le  Droit  d’Alerte envoyé  ce  jour à  la  DGOS,  à  la  DGSC, au  CHSCT  du conseil supérieur  de la  fonction  publique hospitalière, au ministre  des  solidarités et  de  la  santé, à  la  ministre  du  travail,  au  1er ministre, et  au Président de la République. 


Messieurs  les  ministres,  Madame  la  ministre, Mesdames  les  Directrices, Monsieur le Secrétaire d’État, Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Président, 

Tou-te-s  les  professionnels  des  secteurs  de  la  santé,  du  social  et  médico-social  sont  en  danger.  Ils  et  elles risquent leur vie au travail tous les jours et la fédération SUD SANTÉ SOCIAUX, membre de l’Union Syndicale Solidaires, a le devoir de leur permettre d’être considéré-e-s réellement, d’être respecté-e-s, et de pouvoir se protéger. Notre fédération a aussi la charge de rétablir une vérité détournée, trafiquée, cachée pour que votre mensonge d’État ne soit jamais triomphant.

C’est pourquoi la Fédération SUD Santé Sociaux dépose par la présente le droit d'alerte suivant :

Conformément  aux  articles  L.4131-1  et  suivant,  vous  vous  devez comme  tout  employeur,  et  en  qualité  de ministres,de directrices, de président,de protéger les salarié-e-s du public comme du privé qui continuent à travailler malgré la pandémie de Covid 19.  

Vous  vous  devez  de  prendre  toutes  mesures  nécessaires  pour  assurer  leur  sécurité  et  protéger  leur  santé physique  et/ou  psychologique. Notre  fédération doit  rétablir  la  vérité.  En  effet,  les  procédures  que  vous préconisez  ne  sont  pas  suffisantes.  Malgré  vos  annonces médiatiques  régulières,  la  Fédération  SUD Santé Sociaux constate, à travers l’analyse des nombreux droits d’alerte et Dangers Graves et imminents déclenchés par ses équipes dans de nombreux établissements du Territoire, tant dans les centres hospitaliers que dans les établissements  du  secteur social  et médico-social,  du  secteur  public comme  du secteur  privé,  lucratif ou  non lucratif, les graves dysfonctionnements suivants : 

Concernant le matériel de protection Individuelle :

Pendant de nombreuses semaines, il a manqué dans la majorité des établissements sanitaires, médico-sociaux et  sociaux,  des  masques chirurgicaux,  FFP2, surblouses  à  usage  unique,  des  gels  hydro-alcooliques,  gants, lunettes, etc. Pire, sur la base de la doctrine fluctuante en la matière, les directions ont sciemment désinformé les professionnels sur l’utilité des différents masques, sur les circonstances dans lesquelles ils devaient être portés.  La  focalisation  a  été  mise  sur  le port uniquement  en  présence  de  personnes  dont  la  contamination était  avérée, ignorant sciemment  la  particularité  du  virus  véhiculé  par  une  écrasante majorité  de porteurs sains ou très peu symptomatiques.  

Le gouvernement, le ministère, les ARS, les directions d’établissements, et y compris les cellules d’hygiène hospitalières ont fait le choix du parti-pris de mentir sur les moyens et pratiques de protection proposées aux professionnel-le-s  face  aux  risque  de  contamination  du  COVD19.  Ce  parti-pris  consiste  à  prioriser  la  gestion des  stocks de matériel, insuffisante en quantité disponible autant qu’en capacité réelle de protection des professionnels face à la contamination.

- Les protocoles d’hygiène, les préconisations, les bonne pratiques hospitalières, les consignes données et les protocoles institutionnels fournis par ces instances dirigeantes, en déclinant ce parti pris dans les consignes de sécurité, renforcent la mise en danger des professionnels qui les appliquent. 

- Le  manque  de  matériel,  mais  aussi  la  qualité  déficiente  du  matériel  fourni,  est  un  facteur  aggravant supplémentaire du danger grave et imminent qui est imposé à l’immense majorité des salariés de ce secteur.

- L’absence  totale  de  prise  en  compte  de  la  période  de  14  jours  d’incubation  asymptomatique,  mais néanmoins  contagieuse, est un facteur aggravant supplémentaire de l’exposition des professionnel-le-s  à  la contamination au COVID 19 dans le cadre de leur travail. Ce déni volontaire est pourtant patent de la part des autorités  sanitaires et des directions. Il ne  fait  que  potentialiser  le  danger grave  et imminent encouru par les professionnels.

- Les  choix  du  gouvernement  de  ne  pas  réquisitionner  en  urgence  et  de  manière  massive  tous  les  moyens possibles  de  fabrication  d’EPI [équipement de protection individuelle],  laissant  cette  initiative  à  la  bonne  volonté  des  particuliers  de  manière symbolique,  coupe toute perspective  d’obtenir  rapidement  ces EPI indispensables  à  la  protection  des professionnel-le-s. C’est est un facteur aggravant supplémentaire au danger grave et imminent auquel sont exposés ces professionnels.

- Le manque de tests et l’absence de perspective d’en avoir en nombre suffisant pour un dépistage massif envers les professionnels et la population, eu égard à la période dangerosité de la période d’incubation asymptomatique mais contagieuse, est un nouveau facteur aggravant du danger grave et imminent.

Nous  vous  alertons  également  sur  la  note  MARS  N°2020_28  qui  relaie  la  possibilité  de  mettre  au  lavage  des surblouses pourtant prévue à usage unique, et de distribuer des masques artisanaux (ni chirurgicaux, ni FFP2) aux  professionnels  de  santé  et  aux  patients  dépistés  positifs. Cette  note  est  une  préconisation irresponsable de plus et une grave mise en danger par les soignants. Elle relève bien de votre seule responsabilité. 

Comme l’a jugé très  récemment  le  juge  des  référés,  saisi  sur  les  obligations  de  La  Poste  en  matière  de protection  de  ses  salarié.e.s, “l’employeur  ne  peut dans  ce  domaine  se  borner  à  paraphraser  les recommandations  publiques  et  officielles  du  Gouvernement  ou  des autorités  sanitaires  compétentes  (à  titre d’exemple : sur les gestes barrières”). Force est de constater que votre Ministère n’a pas rappelé à chaque employeur  ses  obligations  de  moyens  en  matière  de sécurité  de  résultat,  malgré  les  alertes  dont  vous  étiez vous-même saisis de toute part. 

Concernant l’entrave aux Instances Représentatives du Personnel, et en particulier des CHSCT et des CSE

Dans de nombreux établissements relevant de votre ministère, les instances représentatives du Personnel ont été purement et simplement suspendues, sans aucune base réglementaire. Et même après la promulgation de la loi instaurant l'État d’Urgence Sanitaire, qui fixait le principe du maintien de leur consultation dans les délais impartis et des ordonnances en organisant les modalités dans les secteurs publics et privés, de trop nombreux employeurs refusent de reprendre le fil de leurs obligations.

En  ce  qui  concerne  les  CHS-CT et les CSE/CSSCT, de trop nombreux droits d’alerte et déclarations de Danger Grave et Imminent ont été purement et simplement ignorés par les employeurs. Ils n’ont alors donné lieu ni à un constat conjoint, ni à la réunion de l’instance réglementairement prévue.

Par ailleurs,  en  violation  des  dispositions  du  Code  du  Travail,  les  instances  représentatives  du  personnel  ne sont  pas informées des cas de professionnels dépistés  positifs au COVID-19, empêchant  notamment les CHS-CT et CSE/CSSCT de jouer leur rôle dans la prévention et la protection des professionel-le-s.

Votre   gouvernement   et   les   précédents   sont   responsables  de  l’affaiblissement  des  services  publics  et notamment  hospitaliers  mais  aussi de la fragilisation des  associations  qui  interviennent  sur  les  secteurs précités.  Vous  êtes  responsables  de  ne  pas  avoir  anticipé  notamment en matière  de  stock  (masques, test, respirateurs, ... )et matériel. Nous constatons que ce défaut d'anticipation a amplifié l'impact de la pandémie et sans  nul  doute  un  surcroît  de  malades  et  de  morts. Les  professionnel-le-s  qui  interviennent  dans  ces établissements  payent  durement leur dévouement.  Certain-e-s  le  payent  de  leur  vie  ou  de  celles  de  leurs proches. 

Concernant les Risques Psychologiques subis par les professionnels 

Nos équipes nous font remonter l’état d’anxiété extrême des collègues travaillant dans des établissements de première  ligne,  comme  dans  des établissements médico-sociaux, face à l’obligation de venir travailler sans protection  adéquate,  en  prenant  le  risque  de  contaminer  leurs patients  /  résidents,  leurs  collègues,  et à  leur retour chez eux leur propre famille. 

Nous avons également des témoignages sur des retards concernant le déploiement des Plan de Continuité de l’Activité, qui ont entraîné le maintien en poste de professionnel-le-s  en  surnombre  pendant  plusieurs  jours alors  que  leur  présence  était  non  nécessaire  et  que  la  nécessité  du confinement  les  concernait également. Dans le secteur public, d’autres directions ont préféré chercher à imposer la prise de congés plutôt que de mettre en place les Autorisations Spéciales d’Absence pourtant préconisées par vos services.

Nous  vous  déposons  cette  alerte  en  vous  demandant  d'assumer  vos  responsabilités  d'employeur  et  de ministre.  Nous  n'accepterons  pas qu'en  l'absence  de tenue  de  protection  complète  et  en  bon  état  nos collègues soient contaminés dont certains avec des séquelles importantes. 

Nous vous rappelons que l’exigence de sécurité de résultat s’applique également à vous.

Nous ne pouvons pas accepter sans réagir que des salarié-e-s meurent, soient contaminé.e.s et subissent pour certain.e.s des séquelles à vie. 

Nous exigeons : 

→ La mise en œuvre de l’ensemble des dispositions prévues par le Code du Travail lorsqu’il est question  de l’exposition à un agent biologique pathogène de groupe 3 au sens de l’article r4421-3 et 4 à savoir : 

  • Que des  tenues  complètes  de  protection  soient  rapidement  et  réellement  mises  à  disposition  des salariés  des  services  et  associations, publics  comme  privé  qui  interviennent  dans  les  établissements sanitaires, médico-sociaux ou sociaux.
  • Que ces  moyens  de  protections  individuels,  non  réutilisables,  soient  traités  comme  des  déchets contaminés.
  • De tenir  à  la  disposition  des  travailleurs  intéressés  et du  comité  d'hygiène,  de  sécurité  et  des conditions de travail ou, à défaut, des élu-es du CSE les informations suivantes :
  1. Les  activités  au  cours  desquelles  les  travailleurs  sont  exposés  à  des  agents  biologiques pathogènes,  les  procédures,  les méthodes de  travail et  les mesures  et moyens  de  protection et de prévention correspondants ;
  2. Le nombre de travailleurs et travailleuses exposé-e-s ;
  3. Le nom et l'adresse du médecin du travail ;
  4. Le   nom   de   la   personne   qui,   le   cas   échéant,  est   chargée   par   l'employeur,   et  sous   sa responsabilité, d'assurer en cette matière la sécurité sur le lieu de travail ;
  5. Un  plan  d'urgence  pour  la  protection  des  travailleurs et  travailleuses contre  l'exposition  aux agents biologiques des groupes 3 ou 4 en cas de défaillance du confinement physique.


  • D’établir en collaboration avec les services de santé au travail la liste des professionnels exposés 
    • Lorsqu'il s'avère qu'un travailleur est atteint du COVID-19 que tous les travailleurs susceptibles d'avoir  été  exposés sur  le  même  lieu de travail  fassent  l'objet  d'un  examen  médical,  assorti éventuellement d'examens complémentaires.
    • Que des chiffres soient publiés régulièrement pour connaître le nombre de professionnel-le-s de santé, du social et du médico-sociale contaminés.
    • Que chacun-ed’entre eux/elles soit  reconnu-e en  Maladie  Imputable  au  service  dans  le secteur public, en accident de travail pour le secteur privé, et de lever l’ensemble des freins réglementaires trop souvent invoqués par des employeurs qui manifestement n’ont pas entendu votre promesse formulée lors de votre point presse du 23 mars dernier.
    • Que cette reconnaissance et des garanties identiques soient étendues à l’ensemble des travailleuses  et  travailleurs  de  tous  les secteurs qui  ont  dû  continuer  à  travailler  à  partir  de l’instauration du confinement.

Notre fédération pourrait fournir des milliers d’exemples d’ordres hiérarchiques, de protocoles d’hygiène, d’organisations institutionnelles, de décisions prises fournies par les autorités de tutelle ou par les directions, de bidouillages des préconisations et de bonnes conduites...

Nous pourrions apporter des milliers de témoignages validant l’exposition massive des salarié-e-s des secteurs hospitaliers, des secteurs médicaux associatifs, privés ou libéraux, des secteurs médico-sociaux et sociaux.

Nous le ferons quand ce sera le moment. 

Mais une chose est constante : cette période d’épidémie a vu apparaître des fonctionnements de prise de décisions centralisés, mettant à l’écart les organismes représentatifs du personnel.

L’État, le Ministère,les ARS et tutelles, les directions... à tous les niveaux de décisions, c’est un fonctionnement en  toute  puissance  qui  a  appliqué le parti-pris gouvernemental d’exposer, dans l’exercice de leurs fonctions, tou-te-s les professionnel-le-s de ces secteurs à la contamination du COVID 19, par les mécanismes que nous avons évoqués plus haut !

Les professionnel-le-s de ces secteurs sont obligé-e-s de mettre leur vie en danger et celles de leur proches à chaque  journée  de  travail.  Et rien de ce que  propose le  gouvernement ne  va  améliorer  cette  situation  qui semble même être une stratégie, tant les décisions prises sont à l’inverse des besoins des professionnel-le-s. Vous  les  obligez  à  choisir  entre  se  protéger  ou  travailler  dans  les  conditions  évoquées  ci-dessus,  essayer de préserver leur santé ou mener à bien leur mission auprès de publics qui ont besoin d’elles et eux... injonction paradoxale qui rajoute de la souffrance au travail à l’exposition à un danger grave et imminent.

Cette situation légitime à elle seule toute action de lapart des professionnel-le-s  

La Fédération SUD Santé Sociaux vous informe, partout où votre obligation de protection ne serait pas mise en œuvre,  et  là  où  les équipes  subiraient  un  risque grave  et  imminent  de  contamination  pouvant  aller jusqu'à perdre la vie, que notre intention est de les aider à exercer leur droit de retrait légitime ! 


Contact presse:federation@sudsantesociaux.org

Paris le 15 avril 2020


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