16 Apr
16Apr

Pour déconfiner, il faut commencer par organiser sérieusement le confinement


Penser les conditions du déconfinement est une chose, annoncer le prolongement du confinement à la petite semaine, pardon à la petite quatorzaine,  outre que les psychologues diront que ce n'est pas bon pour le moral des confiné.e.s, c'est de la part du gouvernement laisser penser et donner le sentiment qu'il espère bien que nous pourrions en sortir sous peu. Ainsi le Premier ministre annonce son prolongement pour seulement deux semaines avant de déclarer dans les heures suivantes que ces deux semaines seront pires que les précédentes face au virus. Comment ce gouvernement veut-il être compris quand il renforce ainsi le sentiment d'avoir toujours l’œil rivé sur la « continuité économique » ?

C'est d'une politique de salut public dont nous avons besoin

Le confinement est une mesure de salut public. Ce n'est pas une période de détente, encore moins de vacances au point où, pour paraphraser Coluche, nos dirigeant.e.s se croient autorisé.e.s à concéder à nos employeurs publics et privés le droit de nous imputer congés et ARTT sur cette période de confinement. Les personnels, y compris aux MEFs, ne sont ni coupables, ni responsables du confinement, ils ne sont pas redevables de jours de congés, RTT ou CET, alors que le confinement les empêche de sortir et que le meilleur moyen d'empêcher la propagation du virus est de rester chez soi comme ne cessent de le répéter le corps médical et les campagnes menées dans les médias publics. Ils en auront même besoin le moment venu de respirer !

Confiné.e.s, pas en congé de détente mais inquiet.e.s

Les sorties sont extrêmement limitées en cette période et les seules qui semblent finalement réellement autorisées le sont entre domicile et lieu de travail quand on est contraint de s'y rendre. Et encore faut-il ne pas trop s'écarter du parcours le plus court entre les deux. Autrement dit ce n'est là qu'une autre déclinaison du confinement sous la forme d'un « trajet confiné domicile/lieu de travail ».

Le confinement relève plutôt d'une mise en « résidence surveillée » mais, mesdames et messieurs du gouvernement, ne vous y trompez pas, vous qui nous gouvernez aujourd'hui, si la plupart des habitant.e.s de ce pays s'y plient, c'est bien parce qu'ainsi elles et ils ont le sentiment de participer à l'effort collectif pour enrayer la pandémie, en attendant qu'un vaccin nous protège toutes et tous. Elles et ils le comprennent comme une exigence de devoir civique à l'égard de la collectivité, autrement dit elles et ils font œuvre de sens de l'intérêt général.

Limiter au strict nécessaire l'activité pour lutter réellement contre la pandémie

Leur première exigence à votre égard est que, vous qui nous gouvernez, ayez ce même engagement plein et entier à enrayer la pandémie. Et en donniez clairement le sentiment au delà d'injonctions qui paraissent trop souvent contradictoires et contribuent à alimenter l'angoisse de celles et ceux envoyé.e.s en 1ère ligne et de celles et ceux enfermé.e.s à demeure dans un sentiment d'impuissance, également inquiet.e.s face à la propagation du virus pour leur santé et celle de leurs proches dont elles et ils sont séparé.e.s.

Ces confiné.e.s n'en sont pas moins solidaires et entretenant le lien social, forcément mis à mal par le confinement, à travers services et échanges à distance, un rôle précieux alors que chacune et chacun, encore plus les personnes les plus isolées, subit l'enfermement.

L'échange, également précieux, nourrit immanquablement la pensée collective, une pensée citoyenne et active en vue du jour d'après, sur ce qui devra sortir du marché, en dehors d'un discours gouvernemental devenu inaudible. Ce qui, on le devine, n'est évidemment pas pour plaire aux autorités de ce pays, politiques et économiques, à qui cet échange échappe et qui préféreraient pouvoir vite annoncer la sortie du confinement.

La responsabilité des gouvernements engagée

Verbaliser celles et ceux qui contreviennent au confinement pour des motifs de la vie quotidienne paraît dérisoire quand des employeurs peu scrupuleux continuent d'envoyer au travail des salarié.e.s dont l'activité n'a aucune utilité dans l'organisation de la lutte contre la pandémie. Pire, leur acte est contraire aux intérêts de la santé publique. Il est d'autant plus criminel lorsque les strictes conditions d'une protection sanitaire ne sont pas garanties à ces salarié.e.s. Il est criminel à l'égard de leurs salarié.e.s, il l'est à l'égard de notre collectivité humaine. Ils ne pourront souffrir l'impunité le jour d'après.

Le pic de la pandémie, toujours annoncée, cruellement toujours reportée, ne permet pas aujourd'hui de relâcher l'effort. Celles et ceux qui préconisaient l'immunité de groupe en voient les limites et en reviennent, tel le premier ministre britannique Boris Johnson admis en soins intensifs. Et il ne suffit pas de tancer les imprudences de particuliers confinés dans leur vie quotidienne et de laisser croire ainsi qu'on agit.

Le travail, ce n'est pas la santé... surtout en temps de pandémie

La source principale de déplacements dans ce pays et donc de risques de contagions demeure liée aux activités et tâches maintenues. Aujourd'hui seules celles nécessaires à l'organisation de la lutte contre la pandémie doivent persister. Toutes les autres dans le secteur privé et les services publics doivent être interrompues. L'impératif économique dans la période est de réquisitionner les capacités productives nécessaires à la fabrication des matériels, produits et traitements médicaux nécessaires pour sauver des vies. 

C'est le sens d'un « confinement total » dont le terme n'a jamais été utilisé par le président de la République. Au contraire les déclarations ambiguës entre appel à rester chez soi et appel à la reprise du travail, tout comme les menaces de sanctions envers les salarié.e.s qui feraient usage « abusivement » de leur droit de retrait, laissent les mains libres à toute une série d'employeurs qui se moquent même des mesures de protection sanitaire.

Nous pouvons regarder la gestion actuelle de la crise sanitaire et de ses dimensions sociales et économiques à l'aune des propos prémonitoires de Muriel Pénicaud, ministre du Travail, quand elle refusait de porter de cinq à douze jours le congé pour deuil accordé aux parents après la mort d'un enfant sous motif qu'il ne fallait « pas faire encore peser cette charge sur l’entreprise ». Il y a de quoi aujourd'hui s'interroger sur le logiciel de lecture de l'actuelle crise sanitaire.

Que nos dirigeants prennent d'abord toutes leurs responsabilités dans une crise qui bénéficiaient pourtant encore il y a une décennie d'un plan pandémie déclinable et prévoyant et un tout aussi prévoyant stock de santé budgété à hauteur de 1 milliard d'euros, un stock victime des coupes budgétaires.

Aujourd'hui, ayant oublié ce plan pandémie, ses Plans de Continuité d'Activité, son stock de santé ayant été réduit à néant, pour nos dirigeants actuels, dans leur responsabilité de gouverner et donc de prévoir, la meilleure manière de préparer le déconfinement, c’est aujourd’hui de prendre toutes les mesures pour éviter qu’il ne faille le prolonger ! Ensuite il nous faudra examiner collectivement ce qui relève de l'intérêt général, des besoins sociaux et de première nécessité, des missions de protection des populations, de ce qui relève du service public et donc de l'impôt redistributif recouvré par des fonctionnaires d’État.


http://www.solidairesfinances.fr/images/Doc/2020/2020_04_15_Confinement.pdf


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